Korfos – Galaxidi

Mardi 11 Juillet 2023

Nous partons au petit matin pour le canal. Le décor est splendide, des collines vallonnées dans une brume de chaleur, une eau plate comme un étang, aucune âme éveillée.

Nous naviguons au milieu des petites îles et des fermes aquacoles le long du littoral (mangez du poisson bonnes gens c’est bon pour la santé qu’ils disaient – tu reprendras bien du bon bar sauvage de la ferme aquacole de Korfos ? élevés en énormes casiers circulaires ).

A l’approche de l’entrée du canal , le vent s’est levé de face, donc  nous sommes toujours au moteur.

Les constructions posées anarchiquement dans le paysage se multiplient, mitant celui-ci de formes disgracieuses, et pour certaines nous n’apercevons que l’ossature en béton qui semble avoir été abandonnée (il faudra investiguer car ce genre de carcasses en devenir sont assez nombreuses en Grèce et il y a peut être une raison à cela : occuper un terrain pour le maintenir constructible ? obtenir un avantage fiscal ? problème d’argent ? ou construction vraiment en cours ? ) .

Sur la droite de l’entrée du canal, une zone industrielle, une raffinerie et d’énormes réservoirs de pétrole de la Motor Oil devant lesquels patientent plusieurs tankers.

Nous nous présentons en prépayé pour 10h00 devant l’entrée du Canal mais visiblement ici les horaires ils n’en ont rien à lubrifier. Pour preuve, un voilier se présente 15 mn avant nous pour aller à quai et payer (donc pas de pré-résa) et il passe tranquille de suite et seul (pas d’autres bateaux), alors que 15mn plus tard, et alors que la vigie a été dument informée de notre arrivée à 3 miles puis 0,5 mile, à la dite heure du rendez-vous, selon la procédure pré définie, nous devons patienter une heure pour attendre que le voilier finisse de remonter seul le canal et qu’un autre bateau de l’autre côté puisse à son tour le descendre. En effet le canal de 25 mètres de large ne permet pas un flux ascendant et un flux descendant simultanés.

Le canal fait 6 km de long et cela prend 40 mn pour le remonter. Nous le pratiquons derrière un yacht d’environ 77 mètres, arrivé sur ces entrefaites, qui nous grille la priorité car un pilote professionnel était requis et est monter à bord.

C’est un couloir très rectiligne enjambé par 3 ponts fixes tout en haut de la falaise, dont l’entrée et la sortie sont également traversées par des ponts submersibles rétractables pour la route du bas.

L’endroit est vraiment étroit et haut mais les eaux sont turquoises. Les parois de la falaise portent les traces des cisaillements de la roche et, ça et là, on peut observer plusieurs éboulis consolidés au fur et à mesure de l’histoire de cette voie artificielle. Le chemin piéton en bas des falaises à droite comme à gauche n’est plus qu’un vague souvenir discontinu. Le tout est majestueux et très beau et très impressionnant; on ne peut s’empêcher de penser au dur labeur et la sueur derrière cet édifice ans oublier le génie et le culot de ses concepteurs.

Maintenant un peu de mathématiques :  nous faisons presque 8 mètres de large, donc 25 mètres moins 8 mètres, cela nous laisse 17 mètres, divisés par 2 (et j’obtiens l’âge du colonel Moutarde dans le salon) soit 8,5 mètres de chaque côté avant de ficher en l’air nos aventures nautiques par des touchettes inappropriées contre les parois. Alors quand je me retourne et vois que Captain s’occupe plus à photographier cette épopée qu’à s’assurer de l’alignement du catamaran au centre du lit en lâchant la barre, vous comprendrez que je me mette quelque peu en rogne. Ambiance ! qu’un « t’inquiète » ne suffit pas à apaiser.

Enfin nous débouchons sur l’immense golfe de Corinthe dont les rives sont très urbanisées et boisées au moins au départ . Il nous reste 95 miles avant d’atteindre la mer ionienne.  Mais nous le ferons en 2 étapes.

Ce qui est étonnant c’est que tant pour la remontée comme pour la descente du canal, il n’y avait que 1 ou 2 candidats et que nous n’avons croisé aucun bateau sur cet immense golfe ; d’autant plus étonnant que nous sommes en période estivale, que le canal est un raccourci entre la mer Egée et la mer Ionienne, pour éviter le tour Péloponnèse et que c’est aussi un lieu d’excursion touristique vanté dans les brochures ; y aurait-il eu un nouveau confinement ou une guerre nucléaire ?

En route nous croisons nos premiers ailerons de dauphins depuis notre départ de Léros début Mai,  ainsi que des bancs de Salpidae sur des kilomètres, aussi appelées Sea Salp (Ok, OK,  j’ai joué à Sherlock sur Internet pour savoir ce que c’était), espèces de petites choses transparentes et assez plates de 10 cm de long, avec une boule beige (qui s’avère être leur oeil) et dont j’ai craint l’ombre d’un instant qu’elles constituaient une nouvelle arme fatale (arme fatale N° 500 sans Mel Gibson) de la tribu des méduses abhorrées (mais naaan…. pas aborigènes, inculte va ! )

Vivement l’arrivée de notre étape car le japonais dans les oreilles depuis 7h30 ce matin…..et il est près de 17h00.

Il est 17H15 nous larguons l’ancre dans la baie de Galaxidie. Charmante bourgade à l’unité architecturale de toits rouges et maisons blanches ou beiges , R+1 en premier plan , R+2 juste collés derrière, le tout au milieu de la verdure dont des cyprès. Un minuscule port. Pas beaucoup de monde . Une petite dizaine de bateaux à l’ancre dont un superbe catamaran français de 95 pieds nommé Cartouche , qui se loue 65 000 euros la semaine et plus loin un emmerdeur qui se croit obligé d’arroser toute la baie de sa musique de M….E depuis son petit catamaran (j’te jure, la kalach’ de Saint Denis y a qu’ça de vrai).

Quelques courses dans le peu de commerces de la petite bourgade, chères courses, d’ailleurs, de fruits et légumes. Pas beaucoup de monde dans les rues ni d’ailleurs dans les restaurants du petit quai. Galaxidie semble une bourgade endormie sauf à l’imbécile près (cf 3 lignes plus haut).