Vendredi 11 Août 2023
Hier soir resto , le seul potable parait il à des km à la ronde, sur les conseils des habitués français du ponton. Nous marchons plus d’un kilomètre pour le rejoindre en passant par des rues désertes à l’éclairage blafard longeant des appartements et des complexes touristiques plutôt récents et certains hôtels « façon luxe », bien gardés, dont on ne peut rater les micros des animateurs tentant de motiver les masses populaires . On sent le all inclusive dans lequel on rentre au sortir de l’aéroport et duquel on ne ressort que 7 jours/6 nuits plus tard pour reprendre son avion, sauf peut être une escapade aux souks de Hammamet , tous ravis d’avoir pu finement négocier son cendrier artisanal décoré main (made in china) au quart du prix annoncé alors qu’il en n’en vaut que 5% . Remarque, tout le monde est content, l’arnaqué et l’arnaqueur. What else ?
Au resto effectivement c’est plein de locaux et d’étrangers mais ne vous y trompez pas les voitures immatriculées en Tunisie sur le parking sont plutôt Porsche que Clio 20 ans d’âge. De fait, les prix de la carte s’apparentent plus à ceux de la France qu’à la couleur locale. Les spaghettis homard de Stéphane étaient excellents alors que pour le même prix mon saint pierre était sec et sans saveur. En revanche nous aurions bien repris des crêpes suzette au dessert. Nous avons également goûté l’alcool de figue local le boukha, pas mon truc du tout, pas de quoi fouetter mes papilles plus enthousiasmées par l’alcool de poire, de prune ou de framboise .
Sur le ponton, beaucoup de bateaux français de retraités ayant élu domicile à l’année sur les pontons de Port Yasmine, faisant des come back en France de quelques semaines au cœur de l’hiver. Bonjour l’angoisse !, Salut la déprime !, ne m’attendez pas.
Avec seulement 30 degrés il fait chaud car le taux d’humidité donne un ressenti supérieur. Tout est moite et collant. La rosée inonde le pont.
Il nous faut aller à la cueillette et si possible à la chasse. Nous traversons le complexe maritime . Totalement déprimant : des resto à l’abandon , des supposées boutiques fermées, des trottoirs sales et non entretenus, le désert dans les allées de la nouvelle Médina – 2 bouts de rues avec une dizaine de magasins fermés – . Le touriste ne semble point au rendez vous .
Au sortir de la Marina, une grande avenue aux trottoirs déserts avec des hôtels à l’abandon/en cours de destruction ou de rénovation ? et des magasins plus ou moins fermés. Nous nous rendons dans le supermarché…… pour faire chou blanc (ça c’est de l’humour au second degré , car de chou point en vue ni rouge ni blanc ) . 2 melons se battent en duel avec pour témoins 1 vieille salade et 2 pommes de terre ayant connu de meilleurs jours. Quant au rayon viandes, il n’abrite que 2 escalopes et 3 cuisses de poulet ayant demandé asile politique. Pour les autres rayons ils sont bien achalandés en produits de tout genre, du futa de plage à l’assiette ciselée en passant par les conserves et les produits d’entretien. On trouve de tout sauf ce que nous sommes venus chercher.
Il faut donc nous résoudre à prendre un taxi pour nous rendre à 5 km où parait il les fruits et légumes sont en vente le long de la route.
Nous prenons place dans une VW Polo, 16 ans d’âge affichant 750 000 km au compteur, amortisseurs et pneus d’origine. C’est quand même son 3eme moteur car un moteur coûte 2200 dinar (soir environ 650 euros), donc pas photo tant que le plancher tient …..Les autres véhicules sont à l’image du taxi, sauf peut être une mazerati et quelques 4×4 immatriculés en Tunisie (loués sans retour chez Europcar en Pologne ? ou payées cash à Marseille ?). La circulation est infernale et anarchique, c’est celui qui a la plus …… qui gagne. Froissement de tôles et klaxons à demande.
Le taxi nous dépose chez le « primeur » qu’il juge le plus honnête (Et en fait, choix limité car peu de vendeurs le long de la route contrairement à ce qui nous avait été indiqué) . Une boutique de 9M2 non éclairée et à la propreté collante plus que douteuse dans laquelle s’alignent des cageots au choix très très limité de fruits et légumes, soit en décomposition avancée, soit en devenir tant il leur manque plusieurs semaines pour mûrir. Je me fraie un passage au milieu des clients locaux qui sont une dizaine dans ce 9M2 (donc cela doit être une bonne adresse !) et tout en moulinant des bras pour chasser mouches et moucherons, j’essaie de trouver de quoi cuisiner : un véritable exploit. Je m’en sors avec quelques tomates et pêches relevant plus des boulets de canon que de mets à déguster, quelques pommes de terre non germées, des courgettes les moins molles du cageot, quelques aubergines très saines et un énorme melon jaune (pas le choix de la taille) car il faut bien ramener quelque chose pour tenir jusqu’à la prochaine escale. A côté, j’ose un poulet – il n’y en avait que 3 gisant derrière un comptoir qui semblait réfrigéré dans cette échoppe de 5M2 – tout en me demandant s’il allait commencer à puer et à verdir avant le retour au bateau.
N’en pouvant plus de tout ceci, nous reprenons notre taxi qui nous a attendu, j’en ai assez vu, tant pis, nous mangerons des pâtes, je me refuse à poursuivre ces emplettes qui relèvent du parcours du combattant.
La route du retour est dégagée, notre dernière heure est arrivée car l’expression rouler à tombeau ouvert n’a jamais été aussi descriptive de la conduite automobile de notre taxi, fort charmant par ailleurs. 100 km/heure dans l’état du dit taxi (cf descriptif plus haut), c’est s’assurer de descentes d’organes durant les freinages ou les écarts de route intempestifs et imprévisibles des autres véhicules…….fermer les yeux, respirer en grand …..
De retour au bateau je lave tous les achats (sauf le poulet – je n’ai pas osé), d’abord avec une goutte de javel, puis sachant l’eau non potable, je rince en laissant tremper dans de l’eau du quai avec pastilles purifiantes.
Nous allons déjeuner de hamburgers, assez dégueu, sur le port et retour au bateau. Basta, nous nous mettons à la clim à l’intérieur, il est hors de question de ressortir.
Ayant fait la causette avec notre voisin américain (David et Diane Jacobs sur leur cata FP 44 Stray Cat) nous les invitons pour un apéro champagne (il faut bien se faire les représentants de la gastronomie française appelée à disparaître) qui se terminera fort tard par le fameux poulet (mariné par mes soins au soja /citron pour tuer les éventuels germes) au barbecue et pommes de terre et oignons rissolés accompagnés d’un très bon vin rouge et le melon assez goûteux ma fois. Ils étaient ravis et avaient envie de sympathiser, visiblement peu habitués à se faire inviter. Originaires du Wisconsin pour Diane, de Chicago pour David, dernier domicile connu Floride, petite soixantaine, retraités tous 2, ayant tout vendu pour vivre à bord de leur cata depuis juillet 2021, une PO Box comme seule attache pour la poste, le fisc et leur banque. Nous avons longuement parlé de nos respectifs woke/CQFD++/ Black matters/ supposé racisme/policiers tortionnaires/pensée unique, et autres pantalonnades à la mode et ils nous ont laissé une lueur d’espoir : le citoyen américain moyen commence à se rebiffer et boycotter avec succès les porte drapeaux de ces idéologies bientôt dépassées. Il ne nous reste plus qu’à attendre que le mouvement arrive chez nous.