Minorque – Cala Aguila nord Majorque

Mardi 19 Septembre 2023

Il y a des jours où il vaudrait mieux ne pas se lever.

Nous partons sur le coup des 9h30, il y a du vent mais la mer est plate dans la ria de Fornells.

Je mets en route ma yaourtière.

Dès que nous sortons de notre ancrage protégé, nous nous prenons des vagues, de face bien sûr, de plus de 1,5 mètre, en une houle qui claque et plaque le cata, pas drôle pour le coup, d’avant en arrière en bruits effroyables et en bonds (qui s’appellent le tangage) à tasser les vertèbres quand nous retombons.

Mon liquide dans la yaourtière déborde au rythme des coups de boutoir , ça plus le taux d’humidité effroyable, encore une fournée que je pressens ratée et bonne à jeter. Je verrai ce soir au bout du cycle mais je ne m’attends à rien de bon.

Je fais un tour dans le verger, situé dans notre cabine, lieu le plus à l’abri du bateau en termes de chaleur et de lumière. Et là ! catastrophe : le melon est pourri et je dois le jeter à la dégustation des oblades, toute ma réserve de poires également. Le taux d’humidité ne fait pas bon ménage avec les fruits. Pour les poires je vais devoir me mettre fissa fissa à la créativité culinaire pour récupérer ce que je peux. Ce sera : fondant aux poires et une salade de poires ou un crumble aux poires en plus du fondant. Ce n’est pas encore aujourd’hui que je vais aligner ma silhouette sur celle d’Angelina Jolie.

Le moral n’est donc pas au beau fixe.

Nous hissons la voile. Il ne fait pas beau mais le temps est toujours aux tropiques sous une chappe si grise et si basse,  qu’un canal s’est pendu, chantait notre belge  bien aimé à propos des contrées dans lesquelles j’ai vu le jour.  Voile qui ne nous aidera pas beaucoup puisque nous devrons remettre en route le moteur un peu plus tard faute de vent suffisant pour contrer les vagues.

Je vaque à mes occupations de ménagères de plus de 60 ans tantôt retenant ma yaourtière, tantôt me rattrapant in extremis de l’épaule, du bassin, des genoux, des coudes, bref de ce que je peux, à ce que je peux,  après des vagues scélérates , tout en préparant le déjeuner, tout en élaborant mon fondant aux poires, tout en lançant une lessive.

Ça y est, je peux poser mon honorable séant, mais que nenni ! : nous venons de perdre le boulon qui retient la voile et la baume au mât. La baume menace de tomber lourdement (et donc dommageablement) sur le pont . Je dois jouer les forts des halles dare dare pour aider à soutenir la baume et essayer de la remettre dans le trou (déboulonné c’est bien le terme, maintenant je vois pourquoi cette expression) avec les vagues par le travers de plus de 1 mètre !!! Je lève tout de suite le suspens : mission impossible ! Moralité : nous avons les mains pleines de cambouis (et aussi sur les vêtements et sur tout ce que nous touchons), le dos en compote d’avoir essayé de porter cette baleine morne et nous avons failli passer à la baille du fait du roulis des vagues. Nous abaissons l’arrière de la baume sur le canapé du roof top pour soulager le poids et éviter la chute de celle-ci . Nous verrons ce que nous pouvons réparer au mouillage quand (je l’espère) ce sera plus stable.

Attends, c’est pas fini : c’est alors que Captain se demande ce que c’est que ce drôle de bruit dans le moteur Tribord : il n’y a plus qu’un filet d’eau dans l’échappement de celui-ci – donc pas normal du tout – on éteint le tribord et on ne marche plus que sur le babord sans possibilité de plan B avec la force motrice d’Eole faute de baume reliée au mât (bref cf ci-dessus si tu n’arrives plus à suivre) . On verra ça aussi au mouillage !

Je commence à avoir hâte d’atteindre une crique bien protégée sur Majorque, le moral dans le baskets et la rogne de se dire que nous venons de passer 15 jours au port de Hyères pour nous mettre à l’abri de tous ces problèmes : révision des moteurs et révision de la mâture. Surtout qu’ils ne touchent plus à rien. Tout marchait bien avant.

Je mets à sécher les lessives, et en remets une autre au jus car il faut maintenant enlever la graisse sur les vêtements …. quand, pour bien terminer la journée, et en rajouter une couche ……. Il se met à pleuvoir.  Malheureusement pas assez dru pour nettoyer le bateau du sel et des restes de boue …. Schrogneugneu de schrogneugneu, mais assez bruineux pour transpercer les carapaces. Alors là c’est le pompon ! la moule sur l’otarie.

Allez je m’occupe maintenant de la compta locative.

Puis nous arrivons sur le coup de 18H15 au mouillage et qui c’est qui s’y colle devant sous la pluie pour aller jeter l’ancre ? avant d’aller de nouveau faire le fort des halles pour soulever la baume, sans me dire quand il faut que je relâche l’effort !,  préparer le diner et faire la vaisselle sans oublier de sortir et étendre le linge de la 2eme lessive  ?

Et Stéphane me demande de sourire !!!! Je suis à deux doigts, au choix, d’offrir un billet de 100 euros au premier bateau taxi qui passe pour me ramener à la maison ou sauter à la baille pour abréger mes souffrances ; à votre avis ? Je requiers l’avis du public Jean Pierre .

Pas de doute nous sommes arrivés à Majorque : d’entrée de jeu des immeubles immondes au bord de l’eau . Et viva Espana va bientôt crier la foule en délire cervezesque ? je souligne qu’il y a quand même du Et boum et boum sur la plage sous la pluie !!!

19H30 : le piton est dans le trou, la baume est réparée ! et il pleut des cordes : cela devrait avoir le mérite cette fois de rincer le bateau .

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *