Samedi 1er Octobre 2022
Au réveil nous cherchons l’eau . Elle est tellement plate et transparente que l’on croirait le bateau posé sur une prairie verte, bleu marine et turquoise, de sable et d’algues .
Telle une sirène elle nous attire et nous cédons à son chant muet en traçant notre sillon silencieux sur ce miroir à 24 degrés (pas l’angle bien sûr, à quoi tu penses !!! tu as déjà vu un mer oblique ?) . Le bonheur à l’état pur. On aurait eu tort de s’en priver . Serait ce la dernière baignade de notre périple ?
Nous devons cependant songer à reprendre notre tracé car la mer est fourbe . Elle t’attire dans ses filets et incite à te sédentariser dans une anse paradisiaque pour mieux t’agresser l’instant d’après. Même Ulysse a failli céder.
Le mauvais vent annoncé pour toute la semaine est confirmé et nous devons annuler la venue de G. et S. pour ne pas les bloquer dans un port sans intérêt. Je suis très déçue d’autant plus que c’étaient nos derniers guest stars, que je me faisais une joie de revoir dans ce contexte, et me faisais fort de leur faire aimer la vie à bord. Ils seront prioritaires l’année prochaine pour notre retour sur les mers de la méditerranée.
Le Nord de Amorgos que nous longeons est montagneux et nous nous interrogeons sur les multiples sillons serrés en restanques qui parcourent ses flancs dans des pentes improbables : vestiges d’anciennes cultures ou exploitations encore en cours ou caprices des reliefs ?
Nous mettons le Code D par 7 noeuds de vent par le 90 degrés et avons la bonne surprise d’avancer sereinement sur une mer plate à 4,8 nœuds (siou plait, respect !) . Le silence est de rigueur, le recueillement devant cette eau pure et quelques iles montagneuses et ingrates dans le lointain.
Nous passons au large de l’île de Kinaros , éloignée de toute vie (20 nautiques de l’île la plus proche, 1 heure de Zodiac environ d’Amorgos ) , montagneuse et aride mais tellement belle sous ce soleil éclatant et ce ciel dépourvu de tout nuage, laquelle abrite d’après internet un seul habitant : une femme de 67 ans installée depuis 2000 et veuve depuis 2013…. Mais comment fait elle ? elle aurait pour compagnie ses chèvres , son fils 3 mois par an, et pour l’électricité : le photo voltaïque , pour l’eau : un puits , pour la nourriture : elle se contenterait de peu….. bonjour le blues les soirs d’hiver ! bon au moins elle n’embrouille qu’avec elle-même.
Plus loin l’ile de Levitha à 18 km dans laquelle vit une famille de 5 personnes à l’année mais vivant des voiliers de passage (restauration, bouées de mouillage et le gîte si nécessaire) .
J’aurais aimé m’y arrêter pour jouer quelques jours les Robinson Crusoë, mais nous avançons bien et pour une fois sous une voile si reposante et zénifiante , il serait dommage de nous faire rattrapper par le Meltem annoncé, coûte que coûte il nous faut progresser .
Nous jetons pour la dernière fois de la saison l’ancre au Sud de l’île de Léros histoire de retarder au maximum notre retour à la civilisations terrestre . La morosité me gagne, je ne veux pas penser au retour .
Léros est différente des dernières îles (elle ne fait d’ailleurs pas partie des Cyclades mais du Dodécanèse ) . Ella semble plus habitée par des locaux que par des touristes. L’architecture est moins belle, les petits pêcheurs semblent plus actifs. Nous sommes à vol d’oiseau à 34 km de la Turquie .